Réflexion
Le départ de Jacques
57 ans. J’aurai cet âge en 2016. Le 12 Avril 2016 en fait. Mon papa avait cet âge-là quand il n’est jamais revenu d’un rendez-vous galant. D’ailleurs, il ne s’est même jamais rendu chez cette belle amoureuse qui l’ attendait à Longueuil, le 7 Janvier 1989. Sans pneus d’hiver, sans ceinture de sécurité, au volant de sa « Isuzu » turbo que je lui avais recommandée car j’en avais une et je l’adorais, il a perdu le contrôle et a continué sa course tout droit, au lieu de tourner dans la courbe, à la sortie du pont Jacques-Cartier, se dirigeant vers la route 132. A-t-il manqué la sortie « Longueuil » et a-t-il voulu, paniqué et trop tard, faire demi-tour? De toute façon, le Chrysler New-Yorker énorme, vieux, même pour cette époque, ne s’est même pas posé la question; il voulait lui, arriver vite à destination et n’a malheureusement pas vu cette petite voiture au comportement bizarre, lui barrer le chemin sur la voie rapide. Le choc fût violent. La collision se produisit du coté passager avant de la voiture de mon père. Sous l’impact, la « Isuzu » se plia en forme de « v ». La poitrine de papa se fracassa contre le volant de sa voiture, ce qui lui rompît l’aorte. Il survécût quelques minutes seulement, inconscient, à cette blessure fatale.
À 17:30, en ce samedi d’hiver ou il neigeotait, tout était immobile. Même les flocons de neige sur la photographie de la première page du « Dimanche-Matin ». Je restai en face de cette image, béât, hypnotisé, paralysé, ne croyant pas ce qui venait de se produire. Penché, à genoux, à l’intérieur du tas de ferraille, un ambulancier essayait d’agripper une forme grise au volant de ce qui restait d’une voiture. On ne distinguait pas les visages, mais mon cerveau et mon coeur ne pouvaient s’empêcher d’imaginer les traits du héros de mon enfance, tête baissée, yeux ouverts, recroquevillé sur lui-même, mais sourire aux lèvres, comme si le temps s’était arrêté au moment ou il écoutait la voix d’Yves Montand et qu’il chantait avec lui.
Racines
Mon père, Jacques, et Lucienne, sa soeur, vers 1944
En 1945, mon père Français, et aussi Juif, alors âgé de 14 ans, faisait tout pour retrouver sa soeur, 10 ans, habitant quelque part en France. Ils avaient été tous les deux placés dans un orphelinat, séparés, à des kilomètres de distance, après l’enlèvement de leurs parents. Mes grands-parents donc, sont morts dans les wagons les menant aux camps de concentration. Après leurs retrouvailles, mon père et ma tante ont fait des démarches pour se faire adopter tous les deux au Canada et donc, avoir leur citoyenneté Canadienne, ce qui fût fait. Ils ont été adoptés par la famille « Laxer », ici à Montréal, dans le quartier « Snowdon ». Je suis extrêmement touché et ému ces jours-ci car j’entreprends les mêmes démarches, mais à l’inverse. Je suis régulièrement en communication avec la France dans le but d’obtenir ma citoyenneté Française. Je serai donc Français, en plus d’être Canadien, sûrement pour mon 57 ième anniversaire de naissance l’année prochaine. Papa nous a quitté en 1989, à 57 ans, à cause d’un bête accident d’automobile; inutile de dire que je pense à lui très fort en ce moment.
Question de choix
C’est difficile de faire en sorte qu’on se sente le plus mal possible; il faut faire un gros effort pour se concentrer de toutes nos forces sur tout ce qui va mal près de nous, ou plus loin, dans le monde. Poser toutes nos pensées sur la lumière, et il y en a beaucoup, déployer toute notre énergie pour voir, entendre et ressentir ce qui est beau, est une source d’épanouissement, de joie, de plaisir, et de bonheur. Choisir de bien nourrir son cerveau, tout comme son estomac d’ailleurs, est enrichissant et souhaitable.
Regardons ce qui est beau, respirons ce qui est pur, écoutons ce qui est édifiant et intelligent, ça ne peut que nous faire du bien. C’est une question de choix.
Aider
Un jour, les adultes, les plus vieux, tu sais…ceux qui te guident, qui t’éduquent, qui te conseillent, eh bien, ces gens-là disparaissent. C’est normal. Ce jour-là, tu réalises que tu es tout seul. Seul mais essentiel, car c’est toi maintenant l’adulte qui aide, qui guide, qui conseille. Alors, tu te souviens de l’amour que tu avais pour ceux qui sont disparus et tu réalises avec certitude que tu es aimé.
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