Souvenirs

Mentors

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Je cherche, pour le plaisir, un personnage, un acteur ou une actrice qui a accompagné mon enfance pour le, ou la remercier de m’avoir fait du bien en stimulant mon imaginaire de petit garçon. Je réalise qu’il sont presque tous décédés. Je me rends compte également, que presque tous mes mentors, mes guides, mes maîtres du métier et aussi de la vie, je réalise que, eux aussi, sont partis. Les larmes me montent au yeux; c’est un mélange de tristesse, mais surtout de gratitude, qui m’habite. Une immense vague de reconnaissance m’envahît, en me rappelant tous ces gens que j’ai aimé, que j’aime et que j’aimerai toujours. Et les précieux qui sont toujours avec nous, ceux que je rencontre de temps en temps, si vous lisez ceci; je vous dis merci un million de fois. ❤️ Pour tout.❤️

Toutes les réactions :

78Marie-Andrée Rioux, Christian Thomas et 76 autres

Maman

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Quand tu étais sur terre avec nous, à partir de l’âge de 10 ans si je me souviens bien, je n’osais plus t’appeler « maman ». Peut-être même plus jeune. Je ne sais pas exactement pourquoi. Je me souviens aussi que tu ne voulais pas que mes enfants t’appelle « grand-maman », ça te rappelait trop que le temps passe. D’ailleurs, tu me disais souvent: « C’est tellement injuste vieillir! » Ça te rendait triste. Injuste? J’aurais aimé te soulager, te faire rire.Si Frédéric, Colin ou Juliette t’appelait « grand-maman », tu t’offusquais, tu disais à celui ou celle qui osait utiliser ce rang généalogique diabolique: « Eille, ça va faire, lâche moi l’grand-maman toi! ». Mais c’était pour rire je pense. C’est sûrement la pudeur de la famille Laurendeau qui t’empêchait de me prendre dans tes bras après que j’ai dépassé l’âge vénérable de 10 ans. C’est peut-être pour ça que je n’osais plus t’appeler « maman ». Mais je sais que tu m’aimais et que tu aimais mes enfants. Tu les adorais. »Maman… aujourd’hui, en ces temps « particuliers », j’aimerais tellement que tu me prennes dans tes bras, comme quand j’étais tout petit. »

La table

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Toute une génération de metteurs en scène, d’auteurs contemporains et d’acteurs est en train de partir. Normal. La logique implacable de notre finitude. Mais c’est toujours difficile de les voir nous quitter. Sur mes films 8mm, autour de la table familiale que je possède maintenant chez moi, je peux voir une bonne partie de cette génération. Quelle troupe ça ferait aujourd’hui. Paule Bayard, la première Bobinette, Guy Lécuyer, Albert Millaire, Amulette Garneau, Hélène Loiselle, Jacques Zouvi… entre autres. Plus tard, je me souviens, autour de la même table; Olivier Guimond, Marcel Gamache, Denis Drouin et leurs familles. Et ensuite, mais eux sont toujours bien vivants: Michel Tremblay, André Brassard et leurs personnages. Les tests de maquillage pour ma mère en “Bec de
lièvre” pour le film “Il était une fois dans l’est”. Trois époques, trois facettes de notre milieu culturel, la même table, que j’ai le bonheur d’avoir dans ma cuisine. Ces grands artistes m’ont émerveillé, passionné, épaté, intrigué. Beaucoup plus tard, j’ai eu la chance en tant qu’acteur, de travailler avec plusieurs d’entre eux. Je ne le montrais pas toujours mais ce fût extrêmement touchant. Je me rappelle aussi de Jean-Pierre Ronfard et de Robert Gravel choisissant avec moi les sons et la musique du “roi boiteux”, tous les deux assis sur mon lit, dans ma chambre chez ma mère!
La table n’était pas loin…
Ces jours-ci, je travaille avec une Béatrice Picard en pleine forme.
J’ai aussi l’honneur et le bonheur de monter une adaptation formidable de Michel Tremblay.
 
Je suis encore très ému en travaillant sur ces deux projets.
Et je fais exprès; seul chez moi, je m’assois à la même table, pour y travailler, soixante ans plus tard.

Déjà 60? Chanceux!

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Vite, le temps s’accélère, les minutes s’écoulent, c’est exponentiel; plus on vieillit, plus ça va vite. Je me retourne et je regarde derrière; c’était hier…Tiens, Fanfreluche à la télé, Kim dans la vie, amie de papa, à qui je pouvais parler pour vrai! Jean-Pierre Ronfard qui m’a fait découvrir à nouveau le plaisir du jeu que j’avais égaré après quelques mois d’école de théâtre…le jeu, comme celui tout petit, le jeu; les jeux; comme Robert Gravel, l’essence même du jeu, l’humour incarné, parfois dans le drame, mais toujours l’art vivant, le jeu fou, l’improvisation structurée, émotive et l’homme exigeant pour lui-même… et surtout l’amitié; les discussions de loges pendant « Les trois soeurs » avec lui, chez Duceppe… Colombe, ma maman Amulette, qui jouait dans Cré Basile » avec Olivier Guimond, Denis Drouin, et Béatrice! Comme je les aimais et comme j’étais fier de faire partie, même petit, de leur clan! Jacques, mon papa à moi dans la vie et Domino à la télé, avec Cloclo…oui, Cloclo et son oiseau dans l’émission: « Domino ». Cloclo qui se « fout du monde entier », quand les samedis matins, tout petit Frédéric que je suis, Frédéric que je m’appelais tout petit, assis sur ses genoux, oui, sur les genoux de Claude Léveillée pendant qu’il joue du piano. Chanceux tu dis? En plus, j’ai 6 ans et je suis secrètement amoureux de sa douce, Louise…Ah souvenirs! Piccolo à la télé, Paul dans la vie, Buissonneau dans le travail, avec papa au parc Belmont par un beau samedi d’été…Tous ces artistes, tout cet art, toute cette expression, tous ces besoins de dire pour aimer et faire changer, amuser, plaire, faire rire, pleurer, évoluer, créer…Les amis de la ruelle, Stéfan, mon ami d’enfance, le comité des jeunes de Côte-des-neiges avec Vincent Graton, le rassembleur, mon ami sportif et drôle qui avait le bonheur contagieux et l’amour chanceux…mes camarades de classe à l’école nationale de théâtre, que j’adorais, que j’adore toujours mais qui se sont éloignés…Toutes ces équipes, ces troupes, ces pièces, ces amours, ces adieux, ces retrouvailles…vite…vite, avant que ça s’efface… écrivons, ça passe vite, jouissons de chaque seconde; respirons, goûtons, écoutons, parlons, échangeons, mais en tendresse s’il vous plaît, en beauté et en amour…Chanceux tu dis?

Ma raison d’être

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Mon papa, Jacques Zouvi, français et juif, est arrivé ici à la fin des années quarante, avec sa soeur Lucienne. Leurs parents, Léon et Linda, mes grand-parents donc, turcs et juifs, avaient été enlevés pendant la guerre, et emmenés de Paris aux camps de concentration. Ils sont morts dans les trains qui les emmenaient. Leurs enfants, mon père et ma tante, avaient été recueillis par une voisine en France et ensuite placés, séparément, dans deux orphelinats. Mon père Jacques, 14 ans, faisait des démarches pour que sa soeur et lui se fassent adopter quelque part dans le monde. Son grand rêve était évidemment New-York. Malheureusement, toutes les familles voulaient uniquement la petite fille, Lucienne, toute seule, ou exceptionnellement, le petit garçon, aussi tout seul. Il était très difficile de trouver une famille qui accepterait les deux ensemble. Sauf une mais, à Montréal, au Canada, dans la province de Québec. La famille « Laxer » , famille juive anglophone, dans le quartier Snowdon, a accepté d’adopter mon papa Jacques ainsi que ma tante Lucienne, à la fin des années quarante. C’est la raison pour laquelle je suis ici, avec vous. C’est aussi la raison pour laquelle mon père parlait couramment l’anglais avec un accent français intense, mais un vocabulaire parfait. J’ai eu la grande chance, grâce à Michel-Marc Bouchard, Victor Pilon et Michel Lemieux, de jouer un peu mon grand-père adoptif dans la magnifique oeuvre « cité mémoire » que vous pouvez voir tous les soirs, dans le vieux Montréal. Alors, en ce 14 juillet, vive la France et vive la mémoire de mon père, Jacques.

Inspiration

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Depuis quelques années nous perdons de grands acteurs, de grandes actrices, de grandes et belles personnes. Aujourd’hui, Paul Hébert. Il y a quelques jours; Janine Sutto, Yolande Roy, Benoit Girard. Depuis quelques années; Marc Favreau, Françoise Graton, Huguette Oligny, Luc Durand, Gaétan Labrèche, Amulette Garneau, André Montmorency, Paul Buissonneau, Jacques Zouvi…De grands interprètes, entre autres, de Marcel Dubé et de Michel Tremblay. Toutes ces belles inspirations, ces être humains extraordinaires qui m’ont donné envie de faire ce métier, et qui sont maintenant partis. Oui, c’est normal. C’est le cycle de la vie…

Mais en secret, je me plais à penser qu’ ils sont tous cachés quelque part dans la boite à surprise, et que Pierre Thériault, Monsieur surprise, va me les présenter à nouveau, un à un.

Oui! Piccolo, Sol, le chien échevin sourdine…Oui, je les vois tous venir à moi, tout sourire, avec ce désir de m’émerveiller, de m’apprendre, de me faire rire, et surtout, surtout…de me faire rêver.

Janine

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Avec le décès de Janine, en pensant à cette magnifique actrice et à ses 75 ans de carrière, 75 ans! En visionnant tous ces témoignages et toutes ces entrevues, en pensant à elle, à ma mère et à mon père qui exerçaient le même métier, à tous ces mentors qui sont partis trop tôt , à tous ces camarades, ces amis auxquels je tiens plus que tout; amis acteurs et actrices, concepteurs, auteurs, producteurs, metteurs en scène et assistants, réalisateurs, en m’arrêtant doucement et en voyant tous ces visages rencontrés depuis que je fais ce métier que j’aime, en me remémorant tous ceux qui ont partagé tous ces magnifiques et parfois sublimes instants de création, je réalise à quel point nous faisons un métier extraordinaire. Merci Janine. Pour tout. X

Mon métier

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Métiers formidables que les nôtres; metteurs en scène, concepteurs, acteurs. Métiers de plusieurs adieux aussi. Depuis 35 ans, je rencontre des gens admirables sur les plateaux de tournage, dans les équipes de production au théâtre, et évidemment sur la scène aussi, se déguisant et faisant semblant de jouer avec moi. Ces personnes que j’aime très fort, que j’apprécie énormément, je les quitte à la fin de chaque production, de chaque tournage, de chaque film que je double. Oh oui, bien sûr, on se promet mer et monde : « On s’appelle! On se fait un lunch! On va travailler ensemble à nouveau c’est certain! » Parfois, oui, nous réussissons à tenir nos promesses et à nous revoir. Souvent malheureusement, tous ces gens à qui nous avions promis, tous ces gens avec qui nous étions certains de pouvoir poursuivre une relation d’amitié durable et importante…disparaissent. Le fameux tourbillon de la vie… Je les vois souvent à la télévision, au théâtre, au cinéma et je me rappelle tous ces beaux et bons souvenirs de partages intenses d’émotions sur scène, sur les plateaux et ailleurs, je ressens à nouveau tous ces rires. Mais surtout l’amour. L’amour me revient, me remplit comme une chaleur au plus profond de mon cœur. J’aime mon métier, et je dois m’y faire. C’est un métier de grand bonheur. C’est un métier d’adieux.

18 :00 lundi le 28 avril 1975

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Tu as 18 ans. Moi 16. Tu te souviens? Tu es dans ma chambre, chez ma maman, pour la première fois et tu me fais découvrir Bernard Haller, le grand humoriste Français. Seuls au monde, nous écoutons l’artiste. Quelle découverte! Ton rire unique, contagieux, magnifique m’a séduit. Tu sais, la joie de voir ton immense plaisir à partager ce bonheur avec moi m’a rendu amoureux de toi. Oui, tu as raison, j’étais déjà séduit et amoureux de toi depuis quelques jours. Cette soirée-là, nous avons fait l’amour. Pour moi, c’était la première fois. Je voulais rester à l’intérieur de toi pour toujours. Maintenant, c’est toi qui vis à l’intérieur de moi pour toujours.

Car en 2003, tu es partie, pour toujours. 

Merci d’avoir été dans ma vie.

XXX